
Récemment, une publication élogieuse sur le groupe Facebook Neurchis de bières avait permis de mettre en lumière le travail de Simon Lecomte, propriétaire de la brasserie Ammonite située à Sennecey-le-Grand, en Bourgogne-Franche-Comté.
Issu du monde du vin, ce brasseur plein d’humilité produit des bières acides dans des fûts provenant de grands domaines viticoles de sa région.
Rencontre avec ce passionné passionnant.
Simon, tu viens plutôt du monde du vin à l’origine, qu’est-ce qui t’a amené à te tourner vers la bière ?
En Bourgogne, l’accès au foncier dans le domaine viticole est assez cher, j’ai donc voulu me lancer dans la bière, mais à ma façon : j’avais envie de créer des bières de terroir, car je pense que tout comme dans le vin il y a un terroir pour les bières, que ce soit à travers l’air ou l’eau par exemple. J’ai ainsi choisi d’installer ma brasserie dans une grange qui me paraissait très intéressante au niveau de ce terroir, il y a notamment une eau qui provient d’une source à proximité, et je me suis donc lancé un processus un peu particulier de création de bières à travers ce que j’appelle la vinification de céréales.
Qu’entends-tu par vinification de céréales ?
En fait je fais de la bière un peu comme on fait du vin, par exemple je ne souhaite pas faire bouillir les céréales pour ne pas perdre certains arômes. Les bières que je produis vont, tout comme du vin être mises en fût et elles vont pouvoir se conserver plusieurs années. Je prends d’ailleurs un soin tout particulier à choisir les fûts dans lesquels je vais produire mes bières et je porte une grande attention au moment auquel nous allons faire l’enfûtage. Enfin, j’applique également les principes de la biodynamie à mon processus de brassage.
Tes bières sont des bières issues d’une fermentation spontanée, peux-tu nous en dire plus ?
On m’a dit effectivement que je faisais des bières à fermentation spontanée mais je n’en avais pas forcément conscience. À la différence de nombreux producteurs de bière à fermentation spontanée, je n’ai pas de cuve de refroidissement (aussi appelée coolship), le moût de mes bières refroidit au contact de l’air au moment de l’enfûtage, je laisse les fûts ouverts ensuite et la fermentation par des levures sauvages se fait au contact de l’air mais aussi à l’intérieur, au contact des fûts et des grands vins qu’ils ont contenu. Par exemple, on a effectué des analyses dans la bière Symphonie – Le Grand Assemblage et les résultats ont montré qu’il y avait 158 bactéries et levures à l’intérieur de celle-ci ! Que ce soit le thé, le saké, le chocolat, et bien sûr le fromage, pour moi, tous les grands produits sont issus de la fermentation.
Peux-tu me parler de cette publication sur Neurchis de bières qui a suscité un gros engouement autour de tes bières ?
Oui en effet, tout est parti de Lilian qui a posté ses notes de dégustation de la Cuvée Vendanges Griottes sur ce groupe Facebook dont je n’étais pas membre jusqu’alors. Peu de temps après, j’ai un de mes premiers clients qui est revenu me voir et qui m’en a parlé. On s’est dit avec ma femme que les derniers jours avaient été assez animés au niveau du téléphone et des prises de contact par mail et que c’était peut-être lié à ce post, alors j’ai rejoint le groupe. Et là j’ai vu ce descriptif élogieux envers ma bière, j’ai vu des personnes qui avaient posté des photos avec 25 bouteilles d’Ammonite qu’ils venaient d’acheter… honnêtement sur le moment, j’étais scotché !
On a assisté à un petit raz-de-marée sur tous les stocks d’Ammonite chez tes distributeurs non ?
Oui ! C’en est même devenu un peu frustrant car j’avais tellement de demandes que je ne pouvais pas satisfaire tout le monde. J’ai mis en place un système d’allocations à l’année inspiré du monde du vin pour pouvoir essayer de faire en sorte que tous ceux qui veulent découvrir mes bières puissent en avoir l’opportunité, je fais une répartition qui me semble la plus équitable possible, mais lorsqu’il y en a plus je ne peux pas en remettre plus en ventes.

Est-ce que tes prix vont être amenés à augmenter, comment as-tu géré cette demande ?
On a pu me dire que je ne vendais pas assez cher, mais je considère que je fais un produit simple et j’essaie de le vendre à un prix qui me semble juste. Je garde aussi une petite partie de mon stock à hauteur de 30% de ce que je produis, ce seront des bières qui sont millésimées et qui seront remises en vente plus tard. Ça me permettra par exemple d’organiser un diner avec mes allocataires et de pouvoir proposer une dégustation verticale (une même bière produite lors d’années différentes est ainsi mise en dégustation).
Pourquoi avoir choisi ce nom pour ta brasserie ?
Lorsque j’ai réhabilité la grange où j’ai installé ma brasserie, on a trouvé pendant les travaux le négatif du fossile d’une ammonite. Et l’ammonite pour moi c’est très évocateur, par sa représentation de la spirale de Fibonacci et du Nombre d’Or mais aussi parce que je trouve qu’il n’y a pas de meilleure interprétation possible du comportement de la nature, et pour moi le lien avec la nature est très important, c’est ma partenaire au quotidien.
Avec tes bières, est-ce qu’il y a des accords mets-bières que tu apprécies particulièrement ?
Oui il y’en a plusieurs, avec la Cuvée Vendanges Griottes j’aime bien manger un financier, c’est très gourmand, j’aime bien associer une tarte aux mirabelles avec le Batch 6 pour son côté automnal, il y’a aussi la Symphonie – Le Grand Assemblage qui fonctionne très bien avec des crustacés. Ce que j’aime bien et que j’essaie de conserver sur mes bières, c’est leur forte buvabilité.
Est-ce que tu te souviens de la première bière qui t’a fait aimer la bière ?
Oui, ça date un peu maintenant, ça devait faire un an et demi que je buvais de la bière et j’avais goûté à un Barley Wine de Thomas Hardy, j’avais adoré ça.
Parmi les autres brasseries françaises que tu apprécies, si tu devais en choisir 5 parmi tes préférées, lesquelles citerais-tu ?
Alors il y aurait la brasserie du Mont Salève, la Montagnarde, Iron, la brasserie Effet Papillon et la brasserie La Débauche. J’ai beaucoup aimé la Sacred Heart n°1 et je pourrai boire des litres de leur Amorena !
Pour finir, que nous réserves-tu dans les prochaines sorties ?
Là il y a la Cuvée Vendanges Cassis et le Batch 6 qui viennent tout juste de sortir, et au printemps je mettrai en vente une Cuvée Vendanges Sauvages, c’est-à-dire que ce sont des fruits sauvages que nous avons ramassés et qui poussent dans un rayon d’1km autour de la brasserie. Je me dis que ça ne peut être que les meilleurs ces fruits-là car ils ont choisi d’être ici !
Merci à Simon pour cette interview ainsi qu’à La Binouze Rochechouart pour l’organisation de cette belle soirée de découverte et de dégustations des bières de la brasserie Ammonite.
